Cancer colorectal—Résumé à l’intention des cliniciens

POPULATION

Ces recommandations s’appliquent aux adultes âgés de ≥ 50 ans ne présentant pas de risque élevé de cancer colorectal (CCR). Elles ne sont pas valables en cas de CCR ou de polypes antérieurs, de maladie intestinale inflammatoire, de signes ou symptômes de CCR, d’antécédents de CCR chez un ou plusieurs parents au premier degré ou de syndromes héréditaires prédisposant au CCR (p. ex., polypose adénomateuse familiale, syndrome de Lynch).

 

FARDEAU DE LA MALADIE

Le CCR est la deuxième cause la plus fréquente de mortalité liée au cancer chez les hommes et la troisième chez les femmes; sur l’ensemble de la vie, la probabilité de mourir de CCR chez les hommes et les femmes est respectivement de 3,5 % et 3,1 %. Bien que le fardeau du CCR varie selon les régions au Canada, on estime que 25 000 Canadiens recevront un diagnostic de CCR en 2015 (incidence 49/100 000) et que 9 300 (mortalité 17/100 000) mourront de la maladie. L’incidence et la mortalité du CCR sont faibles jusqu’à l’âge moyen, puis s’élèvent rapidement

 

RECOMMANDATIONS

  • Nous recommandons de procéder au dépistage du CCR chez les adultes âgés de 60 à 74 ans par RSOS (RSOSg ou TIF) tous les deux ans OU par sigmoïdoscopie flexible tous les 10 ans. (Recommandation forte; données probantes de qualité moyenne)
  • Nous recommandons de procéder au dépistage du CCR chez les adultes âgés de 50 à 59 ans par RSOS (RSOSg ou TIF) tous les deux ans OU par sigmoïdoscopie flexible tous les 10 ans. (Recommandation faible; données probantes de qualité moyenne)
  • Nous recommandons de ne pas pratiquer le dépistage du CCR chez les adultes âgés de 75 ans et plus. (Recommandation faible; données probantes de faible qualité)
  • Nous recommandons de ne pas utiliser la coloscopie comme test de dépistage du CCR. (Recommandation faible; données probantes de faible qualité)

 

JUSTIFICATION DES RECOMMANDATIONS

De l’avis du GÉCSSP, la RSOSg, le TIF et la sigmoïdoscopie flexible sont tous des tests de dépistage raisonnables chez les patients âgés de 50 à 74 ans. Cette recommandation attribue une valeur relativement plus élevée au potentiel d’années de vie sauvées supplémentaires chez les patients plus jeunes et une valeur relativement plus faible au manque de signification statistique de l’avantage en matière de mortalité dans les analyses de sous-groupes chez les participants plus jeunes. Selon le GÉCSSP, le bénéfice absolu plus réduit attendu pour le dépistage chez les personnes âgées de 50 à 59 ans justifie une recommandation faible, tandis que la recommandation est forte entre l’âge de 60 et 74 ans. La formulation de recommandations distinctes pour les deux groupes d’âge attribue une valeur relativement plus élevée au rapport différent entre avantages et inconvénients en fonction de l’âge et une valeur relativement plus basse au surcroît de complexité que supposent des recommandations adaptées à chaque groupe d’âge.

L’âge recommandé d’arrêt du dépistage est de 75 ans; il se base sur l’espérance de vie réduite chez les groupes d’âge supérieurs ainsi que sur les âges inclus dans les ERC identifiés dans l’examen systématique. Bien qu’aucun ERC n’ait mis en évidence d’amélioration de la mortalité ou de la morbidité liées au CCR chez les adultes de plus de 74 ans, les essais existants ne sont pas suffisamment puissants pour détecter une différence cliniquement importante dans cette population. Cependant, étant donné que l’incidence s’accroît avec l’âge et que cette recommandation se base sur des données probantes de faible qualité, les adultes de plus de 74 ans indemnes de maladies affectant leur qualité et/ou leur espérance de vie peuvent être moins préoccupés par l’absence d’essais montrant un avantage ou les inconvénients potentiels. Ces personnes doivent parler du dépistage avec leur médecin de première ligne afin de déterminer l’option de dépistage la plus adaptée à leurs valeurs et préférences individuelles.

Bien que la coloscopie puisse offrir des avantages cliniques similaires ou supérieurs à ceux associés à la sigmoïdoscopie flexible, les données probantes sur son efficacité directe en comparaison aux autres tests de dépistage (en particulier le TIF) manquent. Au Canada, les listes d’attente pour la coloscopie sont longues et se sont allongées au fil des années. En raison des besoins supérieurs en ressources humaines (un spécialiste tel qu’un gastroentérologue est nécessaire) et du plus grand risque d’inconvénients, les ERC en cours devraient démontrer le gain d’efficacité de la coloscopie (par rapport aux autres tests) avant que son utilisation systématique dans le dépistage puisse être recommandée.

Cette recommandation est faible en raison de l’incertitude entourant l’efficacité et les inconvénients de la coloscopie en tant que test de dépistage. Elle reflète la valeur relativement plus élevée accordée au manque de données probantes directes (ERC) sur les éventuels avantages additionnels de la coloscopie et sur les coûts de renonciation liés à l’utilisation de la coloscopie pour le dépistage au sein de la population. La recommandation attribue une valeur relativement plus faible aux données probantes indirectes suggérant que les avantages cliniques de la coloscopie pourraient l’emporter sur ses inconvénients cliniques. Elle accorde en outre une valeur moins élevée à la modélisation économique. Nous remarquons que quatre essais examinant l’avantage en matière de mortalité du dépistage par coloscopie sont en cours. Ils seront pris en compte une fois leurs résultats publiés.

 

CONSIDÉRATIONS POUR LA MISE EN ŒUVRE

La recommandation faible chez les personnes âgées de 50 à 59 ans se base sur un rapport entre avantages et inconvénients moins favorable que chez les personnes de 60 à 74 ans, pour lesquelles la recommandation est forte, et signifie que la décision de se soumettre à un dépistage devra être discutée plus en profondeur chez les personnes âgées de 50 à 59 ans.

Le dépistage sera plus approprié chez les patients âgés de 50 à 59 ans intéressés par une faible réduction absolue du risque de décès pour cause de CCR et moins préoccupés par les inconvénients et désagréments potentiels du test. Les patients de 50 à 59 ans s’inquiétant davantage des inconvénients et désagréments pourraient par contre prendre la décision valable de différer le dépistage jusqu’à l’âge de 60 ans ou plus.

En raison de l’accès limité à la sigmoïdoscopie flexible, la vaste majorité des Canadiens pourrait faire l’objet d’un dépistage approprié au moyen du TIF ou de la RSOSg. Les patients souhaitant se soumettre à un dépistage, mais privilégiant des tests moins fréquents (tous les 10 ans) ou réticents à l’analyse des selles par RSOS peuvent être plus enclins à préférer la sigmoïdoscopie flexible à la RSOS.